Depuis
l’année 2012, la Conférence Interafricaine des marchés d’assurance (CIMA), a
aménagé dans les textes qui régissent l’industrie des assurances, des
dispositions qui encadrent la pratique de la microassurance.
La
CIMA faut-il le rappeler est un espace africain qui unit tous ses membres par
le lien d’une législation commune en ce qui concerne la pratique des
assurances. Les pays de cet espace sont ; Bénin, Burkina Faso, Cameroun,
Centrafrique, Congo, Côte d’Ivoire, Gabon, Guinée Bissau, Guinée Equatoriale,
Mali, Niger, Sénégal, Tchad, Togo, Madagascar.
Ces
nouvelles dispositions arrivent à un moment où au niveau mondial, la
microassurance connait diverses fortunes, mais demeure un élément clé dans les
politiques d’inclusion financière des populations. L’Afrique, à ce titre, et la
zone CIMA en particulier, qui revêt une grande partie des pays pauvres du
continent et des économies moins dynamiques, doit pouvoir se doter d’outils
capables d’accompagner cet objectif. Selon le rapport 2012 de la CIMA, le taux
de pénétration de la zone se situe à 1% contre 14,2% en Afrique du sud, 8,0% en
Namibie, 5,9% en Ile Maurice, 3,1% au Kenya, 0,7% en Algérie, 3% au Maroc, 8,9%
en France et 6,5% dans le monde.
En se
dotant d’un cadre règlementaire sur la microassurance, la CIMA marque un regard
d’importance sur la question et apporte certainement, sa réponse à la
problématique d’inclusion financière des populations. En attendant d’avoir le retour
du marché dans l’application de ces textes, nous pouvons jeter un regard sur la
nouvelle architecture du droit de la microassurance qui nous est présentée par
le régulateur.
De
prime à bord, il faut noter l’ouverture que le législateur CIMA fait
à toutes les catégories de populations, notamment celles qui ne peuvent que
s’exprimer dans les langues africaines. En effet, l’article 701
dispose que le contrat de microassurance peut être traduit et commercialisé
dans la langue locale de la population cible. Cette disposition largement
inclusive, participe à la promotion de l’assurance auprès des populations.
Toujours à l’actif de ce même article, il est à relever le fait que le
microassureur ne porte pas l’obligation d’envoi de lettre recommandé à l‘assuré
ou au souscripteur contrairement à l’assureur. Cette disposition qui est levée
pour le microassureur, reste cependant un frein dans le cadre des dispositions
légales pour l’assureur. En effet, le coût que comporte l’entretien d’une boite
postale pour les populations en plus du très faible taux de personnes ayant des
boites postales actives, rend la tâche particulièrement difficile aux
assureurs. L’avancée des technologies de l’information peut suppléer à cette
disposition pour tenir compte de l’évolution du temps.
La microassurance tout comme
l’assurance a été différenciée entre les branches vie et non vie. La branche
vie de la micro présente des modifications importantes dans le nouveau
dispositif. Deux articles retiennent particulièrement notre attention; les
articles 702 et 703. L’article 702 énonce : « …Pour
les assurances sur la vie et de capitalisation, l’assureur ne peut refuser la
réduction ou le rachat lorsque 15% des primes ou cotisations prévues au contrat
ont été versées. En tout état de cause, le droit à rachat est acquis lorsqu’au
moins une prime annuelle a été payée…. ».
L’article 703 est ainsi libellé: « La
valeur de rachat ne peut être inférieure à la somme des cotisations versées par
l’assuré. Pour les contrats mixtes, les cotisations nettes de taxes versées
s’entendent celles relatives à la garantie vie. »
De ces deux dispositions l’on
retient que dans le cadre de la micro, la valeur de rachat est acquise au bout
d’une année et ne peut être inférieure au cumul des cotisations versées.
Toujours en juxtaposant ces
articles, il se posera pour les microasureurs les problèmes liés au niveau des
chargements de gestion à prélever sur les cotisations et celui de la
performance des placements financiers.
En prenant en compte le taux
d’intérêt maximum à garantir que fixe la CIMA, 3,5% l’an, on est tout de suite
tenté de poser l’équation qui égalise le cumul des cotisations avec la valeur
de rachat. Le tableau ci-dessous présente pour
chaque niveau de taux d’intérêt les chargements à prélever sur la cotisation:
Taux d'intérêt annuel
|
Chargements sur prime
|
0,5%
|
0,270%
|
0,75%
|
0,404%
|
1%
|
0,538%
|
1,50%
|
0,804%
|
2%
|
1,069%
|
2,50%
|
1,331%
|
3,00%
|
1,592%
|
3,50%
|
1,851%
|
En garantissant 3,5% de taux d’intérêt
l’an l’assureur aura le maximum de chargements à prélever sur les cotisations.
En tout état de cause, les
modèles d’assurance connus se font avec un minimum de frais prélevés. On
imagine certainement pas les microassureurs ne rien prélever sur les
cotisations des clients assurés, quand on a déjà une idée des coûts
(technologiques, management, etc.) que l’activité de gestion de contrats
d’assurance engendre.
D’une
manière générale, les contrats d’épargne dans l’assurance classique ont des
chargements qui oscillent entre 10 à 15% l’an. En analysant les chiffres des
assureurs vie, l’on note que les frais prélevés pour tous les types de contrats
représentent en moyenne 27% des primes entre 2010 et 2012 dans la zone CIMA. En comparant ces taux avec le
maximum que pourra prélever le microassureur sur les produits épargne, on se
rend bien compte qu’il va falloir déployer une stratégie particulière pour les
contrats épargne à moins que les microassureurs délaissent totalement ce
segment de marché au profit des produits de couverture décès. L’on en vient à se demander l’objectif visé par le
législateur par rapport au rôle que l’on attribue aux produits d’épargne dans
une vision d’inclusion financière totale, qui prend en compte l’accès des
populations à faibles revenus dans à l’assurance, mais également la place que
le microassureur pourra avoir comme ’’micro investisseur institutionnel’’. Si la réponse se situe dans la
quête du volume d’assurés pour assurer un certain équilibre et la rentabilité
du business, il n’est pas à ignorer que le volume s’obtient en finançant des
actions bien souvent à grands frais, ce qui va nécessiter de faire supporter
les coûts d’acquisition aux assurés sur leurs cotisations.
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